Eld4-8 - Appareil d'Arago

Fonction

Mise en évidence de ce que l'on appelait « magnétisme de rotation »


Description et fonctionnement


1. expérience

Sous la face supérieure d'une boite en bois, un disque de cuivre, circulaire, d'axe vertical est mis en rotation autour de cet axe à l'aide d'une manivelle située sur le côté de la boite. Juste au-dessus de celle-ci, on place une aiguille aimantée horizontale sur pivot. Lorsque le disque est mis en rotation, l'aiguille est soumise à un couple électromagnétique qui tend à la faire tourner dans le sens de la rotation du disque. Un équilibre est possible tant que ce couple électromagnétique est inférieur au couple de rappel dû au champ terrestre. Sinon l'aiguille tourne, comme entraînée par la rotation du disque.


2. explication qualitative

Un milieu conducteur, le cuivre du disque, mobile dans un champ magnétique fixe, créé par l'aiguille aimantée, est le siège de courants induits (courants de Foucault). La matière (cuivre) placée dans le champ magnétique dû à l'aiguille aimantée, et parcourue par les courants de Foucault est soumise à des forces de Laplace. Ces forces selon la loi de Lenz, tendent à s'opposer au mouvement qui a créé les courants de Foucault. L'aiguille aimantée exerce donc sur le disque un couple opposé au sens de rotation. Réciproquement (théorème de l'« action et de la réaction »), le disque exerce sur l'aiguille un couple opposé au couple exercé par l'aiguille sur le disque, donc de même sens que la rotation du disque.

En remplaçant le disque de cuivre par un disque comportant des coupures radiales, on réduit les courants de Foucault et diminue considérablement le couple qui provoque la rotation de l'aiguille.


3. explication quantitative.

Soit un élément de volume dτ de cuivre, centré en un point P quelconque du disque, animé d'une vitesse v   , et soumis au champ magnétique B  . Il en résulte au point P

•      un champ électromoteur      E  = v   ∧ B  

•      un vecteur densité de courant       i   = σ v   ∧ B       (σ est la conductibilité du cuivre)

•      une force             df   = i  B  dτ = σ( v   ∧ B  ) ∧ B  dτ

df   = -σ [B2 v   - ( B  . v   ). B  ]dτ

Le couple peut être calculé par intégration. Montrons qu'il s'oppose au mouvement.

Pour cela calculons sa puissance

dP = v   .df   = -σ [B2v2 - ( B  . v   )2 ]dτ

Or B2v2 ≥ ( B  . v   )2. La puissance dP est donc toujours négative, ou nulle, ce qui montre que df   s'oppose au mouvement ( v   .df   ≤ 0).

Histoire

L'expérience que nous venons de décrire est due à Arago Dominique Franco (dit François, 1786-1853). Arago, bien qu'ayant préparé seul l'École Polytechnique, fut reçu premier à l'âge de dix-sept ans, après avoir été interrogé (sans complaisance ! ) par Monge. Sa carrière fut brillante : secrétaire du bureau des longitudes, puis professeur (pendant vingt ans) d'analyse et de géodésie à l'École Polytechnique, il entre à l'Académie à l'âge de vingt-cinq ans. Nommé directeur de l'Observatoire, il fit des cours d'astronomie célèbres. Il fut aussi directeur du bureau des longitudes et devint en 1830 secrétaire perpétuel de l'Académie où il succéda à Fourier. Ce fut aussi un homme politique : après 1830, il siégea à l'extrême gauche comme député des Pyrénées Orientales, département dont il est natif En 1841, il fait partie du gouvernement provisoire (ministères de la Marine et de la Guerre) et fait abolir l'esclavage dans les colonies françaises. Il quitte la vie politique après le coup d'état du 2 décembre 1851.

La mesure du méridien par triangulation, de Dunkerque à Barcelone fut commencée par Delambre (1749-1822) en 1792 et poursuivie avec Méchain (1744-1804) qui fut victime d'un grave accident en Espagne. Delambre et Méchain avaient calculé 90 triangles pour lesquels la somme des angles ne différait de 180 degrés que de moins de 5 secondes Le premier prototype du mètre, présenté le 22 juin 1799 fut déclaré égal à 0,5131 toise. Delambre écrivit en 1810 : « La base du système métrique décimal ».

Lorsqu'il fut question de reprendre en Espagne les triangulations commencées par Delambre et Méchain, Monge fit désigner Arago ainsi que Jean-Baptiste Biot (1774-1862), professeur au Collège de France. Les opérations durèrent de 1806 à 1807. Biot rentra à Paris avant Arago, lequel, pris pour un espion (guerre avec l'Espagne), dut s'enfuir, fut emprisonné puis regagna Alger. Il s'embarque alors pour Marseille mais fut pris par un corsaire espagnol ! Le Dey d'Alger obtint sa libération, mais à nouveau de retour vers la France, une tempête le déporta jusqu'à Bougie. Déguisé en Bédouin il revint à Alger, mais ce n'était plus le même Dey; finalement le Consul de France obtint son rapatriement en France en juillet 1809.

Des médaillons de bronze (135), portant le nom d'Arago, et la direction S-N jalonnent le méridien de Paris. Ces renseignements et la photographie ci-dessous sont dus à M. Delarue, inspecteur général, le médaillon photographié est situé vers le bassin du Luxembourg.

De retour à Paris Arago reprend l'expérience de Malus et observe la polarisation chromatique, il observe la polarisation de la lumière du ciel bleu. Il soutient Fresnel et la théorie ondulatoire de la lumière, fait des mesures de photométrie, étudie la chromosphère solaire, mesure les densités des gaz et la réfraction. En astronomie, il calcule des diamètres de planètes, s'intéresse à l'électromagnétisme (magnétisme de rotation : cette fiche), à l'acoustique (vitesse du son) etc. ... C'est lui qui présenta l'invention du daguerréotype à l'académie de sciences le 19 août 1839 (notice « Opt4-1 »).